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Sacha Guitry, tout son univers, théâtre, cinéma, biographie, livres et citations

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À vol d’oiseau

Revue en deux actes et cinq parties
En collaboration avec Albert Willemetz
Parties filmées réalisées par Louis Mercanton
Crée au théâtre Édouard VII le 12 novembre 1926 (55 représentations du du 11 novembre au 31 décembre 1926)



Argument

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Monsieur et Madame compare et commère d actualité, ne sachant que faire de leur soirée, excèdes de la publicité introduite dans les concerts de T.S F., sévères pour les pièces de théâtre en cour, décident d’aller faire un tour en auto. « Fi donc ! répond Biaise, leur mécanicien. C’est trop vieux. Partons en avion, pour un tour du monde ».


Distribution

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Prologue
Actrice-Acteur Personnage
Robert Darthez Monsieur
Nade Ponvianne Madame
Paul Kerly le mécanicien
Madeleine Lebergy la femme de chambre
L’Amérique
Actrice-Acteur Personnage
Jenny Dolly 1ère baigneuse
Rosie Dolly 2ème baigneuse
Victor Oulmer le roi du savon blanc
Dorade Blanche, sa femme
Félix Ardinet Monsieur Batocala
Daisy Thoma madame Batouala
Alexino Général Bou dou ba da bou
Rudy Monrose Monsieur Becker
Cady Madame Becker
Gaby Benda Mademoiselle Vox
lada Arneva Mademoiselle Senlis
Robert Darthez Monsieur Melun
Alerme Louis
Gaston Dubosc
Jean Coquelin Jonhaton Smith
F. Rauzena la bonne
L’Asie
Actrice-Acteur Personnage
Jenny Dolly le roi de Siam
Rosie Dolly Misou
Gaston Dubosc le précepteur
Gaby Benda la chanteuse
Madeleine Lebergy 1ère chanteuse
Marcel Demarne 2ème chanteuse
Lada Arneva la danseuse
Mikasa Chokich le jongleur
Alerme le grand chambellan
Gaston Dubosc le grand chaf
Alerme le sous-chef
Robert Darthez l’aviateur
Nade Pontvianne sa femme
Alerme le 1er millionnaire
Gaby Benda sa femme
Paul Kerly le chauffeur
Fernand Rauzena le 2ème millionnaire
madeleine Lebergy sa femme
Victor Olmer Louis, le valet
L’Affrique
Actrice-Acteur Personnage
Jean Coquelin Moulaï Youssef
Alerme Ben Ghabrit
Notre vieille Europe
Actrice-Acteur Personnage
Gaston Dubosc l’Europe
Marcel Demarne La Belgique
Paul Kerly la Grèce
Madeleine Lebergy La Hollande
Robert Darthez l’Italie
Gaby Benda l’Espagne
Nade Pontvianne la France
Alerme L’Allemagne
Dolly Sisters l’Ecosse
Dolly Sisters l’Irlande
Jean Coquelin John Bull
Les colonies
Actrice-Acteur Personnage
Lada Arneva l’Algérie


Critique

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Cette Revue des Deux Mondes est un heureux mélangé de scènes parlées, chantées, dansées, et, à dose à peu près égale, de scènes filmées L'amalgame est parfaitement réussi, les transitions ménagées avec dextérité. Partout, un redonnait la grâce, l’humour, le don de plaire, l’adresse souple et sans insistance de M. Sacha Guitry le tour de main habite et agréable de M. Albert Willemetz. La soirée est dominée et conduite par une trouvaille simple et originale.

Monsieur et Madame compare et commère d actualité, ne sachant que faire de leur soirée, excèdes de la publicité introduite dans les concerts de T.S F., sévères pour les pièces de théâtre en cour (on joue pourtant « Debureau »), décident d’aller faire un tour en auto. « Fi donc ! répond Biaise, leur mécanicien. C’est trop vieux. Partons en avion, pour un tour du monde ». Sitôt dit, sitôt fait. Cinéma. Le Bourget. Embarquement. On décode. Presque instantanément, on est plein océan. Qu’est ceci qui flotte sur l’eau d’étrange façon ? « Blaise, descendez» On approche.

Nous sommes près des rives de l’Amérique sèche. Le singulier banc de poissons, aperçu d’en haut, n’est autre qu’un amas de bouteilles de Champagne jetées à la mer, et dont les bouchons sautent l’un.après l’autre, pleins de complaisance, si bien que tout le flot en prend le goût délicieux. C’est fort l’avis de deux jolies baigneuses qui s’en régalent, le creux de leurs mains servant de coupe intarissable. Un peu enivrées, avec beaucoup de politesse et d’esprit, puisque ce sont les Doly Sisters, elles sortent de l'eau, vont se rhabiller chacune sous sa tente Et par un « truc » très bien agencé, elles s’élancent du cadre cinématographique, apparaissent en chair et en os, et ne manquent point, par leur chorégraphie joyeuse, leur entrain de poupées vivantes, de recueillir leur succès habituel. En route, à nouveau, en avion « Qu’est ceci ? Descendez, Blaise. » Scène jouée maintenant.

Il s’agit d’une soirée sur les bords de l’Ohio, donnée par un nègre, le roi du savon blanc, et sa femme, non moins noire, dénommée Blanche, Pour distraire leurs invités, tous de même couleur, ils ont fait venir des artistes de Paris, Mlle Vox, de l’Opéra Comique, qui chante « Paysage » de Reynaldo Hahn. M. Gaston Dubosc qui conte des histoires volontairement simplettes de Sacha Guitry, et deux danseurs, représentant, grâce aux élégances du moment et à leurs atours somptueux et délicats, le bon goût de la vieille France. Ainsi les nègres se délectent de nos anciennes manières, tandis que nous nous réjouissons de leurs ébats contorsionnés. Quant au domestique, c’est un ancien sous-préfet dont la fonction fut supprimée par M. Poincaré.

Tout cela est fort plaisant. En route. « Mais qu’est ceci ? Blaise, descendez... » Nous arrivons chez un ancien Président du Conseil américain qui réassemble comme un frère à M. Clemenceau, et qui écrit à la France, le dollar étant tombé à 2 fr. 15, une lettre semblable comme une sœur, à celle que le Tigre expédia de chez nous!, outre océan. On s’est diverti sans amertume, parce que c’est très drôle et parce que nous sommes bien gentils. En route. « Qu’est ceci ? Blaise... » Ceci, c’est le palais du Roi de Siam. Un roi tout menu, tout poupin, tout joli, et qui est Miss Jennie Dolly. Il veut partir pour Paris, hors Paris, ou même Paname, rien ne l’intéresse plus. Comment faire, puisque la loi ancestrale interdit qu’il quitte son pays. Mais l’on a, au royaume de Sian, tout l’esprit ingénieux de MM. Sacha Guitry et AlbeLt Wiilemetz.

Le petit toi donne donc ordre à son Précepteur de lui trouver, dans les dix minutes, un sosie qu’il installera sur le trône, à sa place, durant son absence. C’est une sosie, Miaou Miss Rosie Dolly), que découvre le Précepteur, et c’est beaucoup mieux, car l’amour s’en mêlera. Le roi siamois épousera la siamoise bergère, sous condition qu’elle sera toujours vêtue comme lui, et qu’il pourra, grâce à ce subterfuge, faire quand même sa fugue à Paris. Entracte. Et puis, en route. La Chine. La Polynésie... « Qu’est ceci ?... »

Cette fois, Madame, Monsieur et Blaise on eu tord de descendre car ils sont immédiatement faits prisonniers par la garde et les cuisiniers du grand chef d’une des îles Sandwitch qui neurasthénique de ne plus avoir de chair humaine, son mets préféré à chacun de ses repas. Blaise s’échappe et va préparer l’envol de l’avion. Les Dolly Sisters, qui se trouvent là, je ne me rappelle plus comment, amusent le chef de danse et d’un jeu qui consiste à le ficeler, tandis qu'il ferme les yeux, et tout le monde peut s’évader. En route. Traversons le Pacifique pour y rencontrer l’île Heureuse, inexistante sur toutes les cartes géographiques. Elle n’est autre que celle ou se sont réunis et où vivent en joie les voleurs internationaux. Aux voyageurs, ils font admirer le diamant rose, les perles de Mme X..., la zibeline de Mlle Marnac.

Mais, bons princes, ils restituent à leurs hôtes, les menus objets qu'ils leurs avaient soustrait pour se faire la main, ne consentant qu’a conserver les pièces de collection. Ainsi possèdent-ils la vraie « Joconde », tandis que le Louvre n’en détient qu’une copie. En route. Traversons l’Afrique. Arrêtons nous au Maroc pour entendre Moulai Youssef conter, avec un tendre enthousiasme, son voyage en France, et puis rentrons dans notre vieille Europe dont l’espoir bat de l’aile a Genève. Nous y rencontrerons la Belgique, la Grèce, la Hollande, l’Italie, l’Espagne, la France et ses colonies, John Bull flanqué de l’Écosse et de l'Irlande, toutes ces nations chantant l'hymne de paix et l’Allemagne pour qui chaque parole a un écho de guerre. C’est fini. Nous avons fait un beau voyage.

Remercions les pilotes qui ont eu le génie de tout enfleurer, de nous donner une nuance choisie de toutes choses, et nous ont dispensé, avec bonne mesure leur habileté harmonieuse et pétillante. L'interprétation est des plus brillantes avec les enchanteresses et amusantes Dolly Sisters déjà nommées, M. Alerme, extrêmement divertissant en domestique blanc chez les noirs, ancien sous-préfet, en grand chambellan siamois, en cuisinier polynésien, surtout en représentant de l’Allemagne, caricature d'un caractère étonnant.

M. Jean Coquelin s’est montré un grand comédien dans ses rôles d’ancien Président du Conseil, de MouI laï Youssef, de John Bull et a pris tout de suite le ton des interprètes de revue. M. Gaston Dubosc montre de la finesse et de l’envergure dans ses diverses transformations Mlle Gaby Benda chante aimablement. Il faut nommer encore MM. Robert Darthy. Kerly, Rauzérui, Oliner. Mlles Madeleine Bergy, Pontvianne, Rauzéna, Demarne, Arvena. ainsi que la troupe noire. MM. et Mmes Oulmer, Dorade, Ardinet, Daisy Thomas, Alexino, Monroe, Cady, et le jongleur siamois Micasa Chakich. On a beaucoup goûté la musique humoristique de M. Georges Auric, au tableau des îles Sandwich, et des louanges sont dues aussi à M Fernand Malet, alerte et excellent chef d’orchestre.

Jane Catulle-Mendes, La Patrie, le 14 novembre 1926


Journal

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La Presse, le 14 novembre 1926
La Presse, le 14 novembre 1926