Critique
Il était un peu ému hier soir, M. Sacha Guitry. C'est que cette « première » sans lendemain servait en quelque sorte de début officiel à sa nouvelle partenaire qui sera bientôt sa quatrième fiancée.
Le sketch de Sacha Guitry dura vingt minutes d'horloge, et les deux Français avaient pour partenaire le célèbre comédien anglais Seymour Hicks.
Autant que les spectateurs présents à l'India Office hier soir ont pu saisir la pensée de l'auteur (l'acoustique de cette magnifique salle laisse, il faut bien le dire, à désirer), le sujet du sketch était la conversation d'un Français qui essaye de parler anglais e' d'un Anglais qui essaye de parler français. Mais parfois les protagonistes, dans leur zèle, oubliaient leur hésitation et M. Seymour Hicks se mettait à parier parfaitement français, et M. Sacha Guitry parfaitement l'anglais.
Malgré tout la saynette eut un joli succès, les gestes ayant heureusement une aussi grande importance dans ce sketch que les paroles, et lorsque M. Sacha Guitry oublie son « Chamberlain » et que son partenaire lui répond en sortant de sa poche une petite écharpe tricolore, la salle éclata en applaudissements.
L'apparition de Geneviève
C'est le rôle de la secrétaire-interprète que jouait Mlle Geneviève de sérevilIe. Mlle Geneviève de Séreville ne figurait pas sur les programmes. C'est que cette jeune et charmante artiste, qui paru en toilette modeste, les bas roulés au-dessous des genoux et un petit nœud de ruban dans ses cheveux, ne sait pas encore comment elle s'appelle. Sa famille ne veut pas qu'elle paraisse sur les planches sous son véritable nom.
Au cinéma, elle s'appelait Mlle Geneviève Chaplain, Mais Sacha Guitry a trouvé que cela faisait, trop prétentieux, à cause de l'autre "Chaplin"...Charlot.
Il lui avait conseillé de prendre un petit nom tout simple : Geneviève de Saint-Jean Mais les de Saint- Jean avaient protesté et avant que commence la soirée d'hier, Sacha Guitry assurait à notre collaborateur qui porte ce patronyme que « Geneviève » allait en chercher un autre.
En tout cas, tous ceux qui ont entendu la jeune comédienne dans son petit bout de rôle affirment qu'elle n'a pas lieu de se faire du mauvais sang pour l'avenir : elle se fera sûrement un nom.
Le Matin, le 25 mars 1939